Mesure phare des ordonnances Macron, le barème d’indemnisation des salariés licenciés sans cause réelle et sérieuse est en train de prendre l’eau.
Le barème jugé inconventionnel par les Conseils de Prud’hommes
En effet, de nombreux Conseils de Prud’hommes ont écarté le barème au motif qu’il est inconventionnel en ce qu’il viole la charte sociale européenne et la convention n°158 de l’OIT, textes que la France a ratifiés ; en conséquence, le salarié licencié abusivement est indemnisé à une plus juste mesure au regard du préjudice subi (cf : CPH Troyes, Activités diverses, 13 décembre 2018, n°18/00036 ; CPH Amiens, Industrie, 24 janvier 2019, n°18/00093 ; CPH Lyon, Activités diverses, 21 décembre 2018, CPH Lyon, Commerce, 7 janvier 2019, n°15/01398 et CPH Lyon, Industrie, 22 janvier 2019, n°18/00458 ; CPH Grenoble, Industrie, 18 janvier 2019, n°18/00989 ; CPH Angers, Activités diverses, 17 janvier 2019, n°18/00046).
Le barème jugé inconventionnel par un magistrat professionnel
Si la doctrine patronale et le gouvernement ont cru pouvoir un temps mépriser ces décisions en arguant, non sans condescendance, qu’elles ont été rendues par des juges non professionnels, hélas pour eux, la même décision a été rendue le 5 février dernier par un magistrat professionnel, en l’occurrence la formation de départage du Conseil de Prud’hommes d’Agen (cf : CPH Agen, Départage Industrie, 5 février 2019, n°18/00049).
L’affolement du gouvernement pour tenter de sauver le barème
Preuve de la fébrilité de l’exécutif face à ce courant jurisprudentiel, le Ministère de la justice a diffusé une circulaire datée du 26 février 2019 par laquelle il demande aux présidents de juridictions de lui transmettre les jugements qui ont fait l’objet d’un appel afin de pouvoir intervenir dans ces affaires, par l’intermédiaire des parquets, et faire valoir le « point de vue » du gouvernement sur cette question.
L’exécutif fournit ainsi une nouvelle illustration de sa conception singulière de l’autonomie du Parquet et de l’indépendance de la justice qu’il proclame régulièrement.
Le fantôme du CNE plane sur le barème
De bonne augure pour la disparition du barème puisque la dernière fois que le Ministère de la justice était intervenu de la sorte, ce fût pour défendre le CNE (Contrat Nouvelle Embauche) institué par ordonnance n°2005-893 du 2 août 2005 (gouvernement DE VILLEPIN), et qui avait également été jugé inconventionnel par certains Conseils de Prud’hommes.
Vaine tentative du pouvoir exécutif puisque le gouvernement suivant avait finalement abrogé le CNE par la loi n°2008-596 du 25 juin 2008.
Le barème Macron connaîtra-t-il le même destin ? Nul ne peut encore l’affirmer mais il en prend déjà le chemin…